Demeure de l’écrivain Jean-Louis Guez de Balzac, célèbre épistolier, conseiller d’État, historiographe de France et l’un des premiers membres de l’Académie Française, le château de Balzac a été construit par les parents de ce dernier, Guillaume Guez, trésorier provincial et Marie de Nesmond vers 1600. L’une des cheminées porte leurs monogrammes et sur l’autre celui de Jean Louis Guez de Balzac.
Né à Angoulême sous le règne d’Henri IV, Balzac était le filleul du Duc d’Epernon et fils aîné de trois enfants.
Du XIIe au XVIIe siècle, les principaux possesseurs en furent successivement Guillaume Sevin, les Tison, les Montaigu ; Louis de Chazerac, gouverneur et bailli du duché de Berry ; Jean Arnaud, lieutenant général d’Angoumois ; sa fille Geneviève et son gendre Geoffroy de Lageard, sénéchal de la province d’Angoumois ; François de Juillac, chevalier d’Ambeville et Guillaume Guez, trésorier provincial à l’extraordinaire des guerres en Angoumois, Aunis et Saintonge.
Il pouvait remonter à l’époque des Normands, il avait pu être placé là au coude de la Charente, comme une sentinelle destinée à barrer la route aux pirates que les ducs d’Angoulême ne purent pas toujours arrêter au pied de leur ville. Guillaume Guez premier possesseur de la famille, eut deux fils ; l’aîné, Jeans Louis Guez de Balzac, qui l’habita de 1636 à 1648 mais ne s’étant jamais marié, le transmit à son frère, François de Guez.
Édifié en bordure de la Charente, le château et son parc rappellent le souvenir de Jean-Louis Guez de Balzac qui en fît son ermitage et que le célèbre écrivain charentais évoque en des pages d’une rare sensibilité.
La terre de Balzac est un ancien fief. C’était une seigneurie avec tour et hôtel noble qui relevait de l’évêché d’Angoulême et de la baronnie de Tourriers, laquelle fût acquise en 1398 par Guy de la Rochefoucauld.
Ce fut la demeure des champs où les Guez se retiraient quand ils quittaient leur maison d’Angoulême « embellie et enrichie de raretés si exquises » , écrit Saint-Romuald, que du 4 mars au 29 août 1619, Marie de Médicis « ne voulut point faire son séjour autre part, jusqu’à la paix que lui donna son fils Louis Treizième ».
Pendant le séjour de la Reine Mère chez les Guez, la seigneurie de Balzac devint le carrefour où se rencontrait l’élite de l’époque : on y voyait Richelieu, le Duc d’Epernon, le cardinal de La Rochefoucauld, le comte de Béthune ; et, quand à la fin du mois d’août, la Reine Mère et sa brillante escorte quittèrent Angoulême pour se rendre à Tours.
Il fut célèbre à vingt-sept ans pour un recueil de « lettres » qui lui valut un concert de louanges dans toute l’Europe. Les esprits les plus éminents le considéraient comme le Prince des Orateurs ; Richelieu le nomma souverain de la République des Lettres. Mais sa jeune gloire attisait les jalousies. Elle souleva des polémiques. Déçu, Balzac se retira dans ses terres où il fut regardé comme « l’oracle de la Charente ». Il y vécut de longues années et son œuvre en est toute imprégnée. « Le Prince, les Entretiens, le Socrate Chrétien » et de nombreuses « Lettres » contiennent des pages qui décrivent la vie de l’auteur dans son ermitage dont il évoque « les plaisirs de la vie retirée ».
Balzac renonça à son droit d’aînesse au profit de son frère cadet François qui hérita la seigneurie à la mort de leur père en 1650.
Les héritiers suivants furent les deux fils de François: en 1685, André de Guez, gouverneur de la citadelle de Dunkerke qui mourut sans postérité et, en 1693, Claude de Guez, seigneur de Puy de Neuille. André de Guez, capitaine au régiment des Gardes Françaises à Paris. Après la mort de ses parents, le 3 septembre 1729, il signa l’acte de vente du château, de la terre et seigneurie du grand et petit Balzac, il ne conserva que l’argenterie, les livres, deux fusils et un coffre contenant les papiers de la famille
Jean-Louis Guez de Balzac mourut le 8 février 1654. Selon son désir, il fut inhumé à Angoulême, dans l’hôpital Notre Dame des Anges, aux pieds des pauvres auxquels il avait légué la plus grande partie de sa fortune. Il repose aujourd’hui dans la chapelle des Cordeliers, ancien hôpital d’Angoulême.
À l’origine, bâti à l’emplacement d’une autre construction, il comportait un corps de logis et deux ailes en équerre avec un pavillon d’angle à haute toiture pyramidale. Les lucarnes à fronton et le balcon en fer forgé sont de cette époque, comme l’ancienne cuisine, la salle à voûte en arc de cloître du rez de chaussée de l’aile nord, une porte et des restes de fresques dans le corridor de l’aile sud. Dans le corps principal, au rez de chaussée, on trouve une enfilade de quatres grande pièces. Et dans la dernière, au sud, c’est un salon du XVIIe transformé au XVIIIe avec de rares portes incurvées. Sous le salon, une cave double voûtée dans laquelle on rentrait les tonneaux d’eau de vie par l’entrée principale côté ouest, on les faisait rouler au sol c’est pourquoi les pavés sont affaissés aujourd’hui.
Il a été doté de trois nouvelles façades autour de la cour carrée au XVIIIe siècle, ce qui crée un couloir alors que dans l’ancienne disposition les pièces se commandaient: on devait les traverser pour passer de l’une à l’autre.
On trouve des peintures murales du XVIIe siècle, uniques, sans doute commanditées par Guez de Balzac, représentant une architecture en trompe-l’oeil et des personnages mythologiques comme Cupidon, Neptune, Mercure…
Alignée à la Charente, cette façade expose au couchant ses grandes fenêtres agrémentées d’appuis en fer forgé. Au dessus, soutenu par une charpente en carène de vaisseau, le toit d’ardoise repose sur une corniche en pierre de taille et offre pour tout ornement deux cheminées surmontées de volutes. Autrefois cette façade donnait sur un jardin à la française qui conduisait au « canal ». Elles encadrent la cour pavée que prolonge la cour intérieure limitée, d’un côté, par les communs et de l’autre, par une galerie à colonne unique et le portail d’entrée qui donne accès à l’ancienne allée des Charmes. Sur la façade côté porche d’entrée, on peut encore voir des arcades du XIVe siècle. Le toit en ardoise lui date du XVIIe siècle et dessous, c’est une magnifique charpente en forme de bateau renversé, aujourd’hui classée que l’on peut voir. La première pièce à droite est l’ancienne chapelle appelée aussi chambre à écho, elle date du XIVe siècle et on y confessait les lépreux.
Quand ils arrivaient de la ville par cette allée longue d’un kilomètre, le maître de maison et les invités entraient par la grille du parc afin d’éviter les mauvaises odeurs des animaux et pénétraient dans le logis par la porte plein cintre, à double battant, située sur l’aile sud.
Le 4 septembre 1622, il écrit à son ami Jacques de la Motte Ayron: « Je ne veux pas vous faire le portrait d’une maison dont l’ouvrage n’est si excellent que de Fontainebleau, ni la matière si précieuse que le marbre et le porphyre; je vous dirai seulement qu’à la porte il y a un bois, où en plein midi il n’entre de jour que ce qu’il en faut pour n’être pas nuit et pour empêcher que toutes les couleurs ne soient noires. Les arbres y sont verts jusqu’à la racine, tant de leurs propres feuilles que celles du lierre qui les embrasse et pour le fruit qui leur manque, leurs branches sont chargées de tourtes et de faisans en toutes saisons de l’année. De là j’entre en une prairie, où je marche sur les tulipes et les anémones que j’ai fait mêler avec les autres fleurs, pour voir si les françaises seraient aussi belles que les étrangères. C’est un pays à souhaiter et à peindre que j’ai choisi pour vaquer à mes plus chères occupations et passer les douces heures de ma vie… L’eau et les arbres ne le laissent jamais manquer de frais et de vert; les cygnes se sont retirés en ce lieu de sûreté et vivent dans un canal qui fait rêver les plus grands parleurs aussitôt qu’ils s’en approchent… Or, de quelque part que je tourne les yeux en cette agréable solitude, je trouve une rivière qui devrait avoir autant de réputation que le Tage…Cette belle eau aime tellement ce petit pays, qu’elle se divise en mille branches, en fait une infinité d’îles et de détours…et quand elle déborde, ce n’est que pour rendre l’année plus riche et pour nous faire prendre sur la terre ses truites et ses brochets… »
Il évoque la galerie où il y a des cartes et des tableaux; sa chambre où les peintres viennent de quatre journées pour étudier et d’où le matin il voit changer en porphyre les rochers qui en bornent la vue. Il décrit la petite galerie qui regarde sur la rivière et qui est détachée du reste de la maison, « on y monte par un escalier dérobé et le maître du logis le pourrait appeler sa bibliothèque s’il voulait donner au choix le nom qui se donne à la multitude ».
Balzac fut très attaché à son ermitage, à son « palais enchanté » où, dit-il, toutes les pensées qui me viennent sont de véritables inspirations. D’illustres visiteurs sont venus, comme en pèlerinage, apporter au solitaire et à « Messieurs ses livres » l’hommage de leur admiration. De luxueux équipages ont amené dans la cour du château des ambassadeurs, des cardinaux.
Depuis 1973, date à laquelle ils en font l’acquisition, Mr et Mme Boissinot s’attachent avec passion à restaurer le château de Balzac qui était à l’abandon et en très mauvais état, caché par la végétation qui avait repris ses droits. Plus de trente ans de labeur, d’investissements, de recherches pour redonner vie à ce qui fut la demeure de l’écrivain Guez de Balzac. Ils ont restauré l’ancienne chapelle qui est une chambre à écho du XIVe siècle et ont ajouté dans la galerie du XVIIIe des gravures offertes par le Louvre et des portraits de Balzac. L’escalier a été restauré par les Compagnons du travail dans le même bois d’origine. Les seuls objets retrouvés au château, quand ils sont arrivés, sont des vestiges de poteries, de vaisselles, que Mme Boissinot s’attache à recoller et reconstituer, et visibles dans une vitrine. Ils ont fait appel à un expert pour définir l’origine des objets, fossiles, serrures et silex retrouvés. Les fresques aussi ont commencé à être restaurées, on peut en percevoir deux nettement, représentant Cupidon et Neptune, grâce aux artisans du coin et avec autorisation. Tous les meubles présents ont été achetés au Salon des Ventes d’Angoulême, chez des antiquaires, de famille ou encore récupérés. M. Boissinot a restauré le puits de 30m de profondeur, un puits unique car accolé au mur d’une forme originale. Côté ouest, en avançant devant le château on trouve un vivier et son escalier, ancienne réserve de poissons, et un lavoir où sont encore les pierres des lavandières. Enfin pas loin de là, on peut apercevoir deux magnifiques poneys Fjord, une race que M. et Mme Boissinot ont amenée en Charente car à l’époque où ils faisaient l’élevage de ces poneys, les vétérinaires de Charente n’en n’avaient jamais vus!
L’ensemble de cette mise en œuvre a été couronné en 2006 par la remise du premier prix national des Vielles Maisons Françaises. Du jamais vu en Poitou-Charentes.
Ce prix vient récompenser le travail de restauration, la diversité et le nombre de manifestations organisées au château ainsi que l’ouverture au public. La somme de 6000 euros, qui leur a été remise, servira à restaurer une partie de la toiture. Ils ont également reçu un prix national de Parcs et Jardins et ouvrent donc leurs jardins lors du week-end Parcs et Jardins.
À voir au château
– la grande salle voûtée
– les fresques du XVIIème siècle
– la cour pavée, le puits, le lavoir
– le canal, la grille d’entrée du XVIIème siècle
– la galerie à colonnes, le porche charentais
Aujourd’hui inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, il accueille les visiteurs durant l’été avec notamment des visites guidées.
Pour les horaires et les conditions des visites, veuillez consulter le site du château en cliquant sur le lien ci-dessous :
http://www.chateaudebalzac.fr